Les 18xx
1re partie : Ma découverte des 18XX (2019-2020)
Voilà bientôt 1 an, au printemps 2019, je me suis lancé dans la découverte des 18XX. Une aventure mouvementée et complexe partagée avec mes partenaires habituels, que je remercie pour leur implication. Un an et 25 parties plus tard, cette aventure nous a ouvert un nouvel univers ludique passionnant et beaucoup plus riche que je ne l'avais imaginé.
Je souhaitais relater ici ce parcours et mon retour d'expérience, en espérant que cela vous donnera envie de vous lancer.
Pour qui ?
Les 18XX sont des jeux complexes, longs et calculatoires. Il faut donc être motivé et persévérant. Mais ce sont aussi des jeux passionnants, à la fois tactiques et stratégiques, dans lesquels l'interaction est centrale.
Si vous avez la chance de connaître un joueur expérimenté qui peut vous accompagner dans cette découverte, ne vous en privez pas. Cela vous permettra d'éviter bon nombre d'écueils et vous gagnerez beaucoup de temps. Et rassurez-vous ces jeux ont suffisamment à offrir pour que cela ne vous gâche pas le plaisir de la découverte.
Il existe également en ligne de nombreux guides stratégiques d'excellente qualité qui pourront se réveler très utiles pour vous accompagner. Mais au tout début, on a bien du mal à comprendre la logique qui se cache derrière certaines affirmations et il est souvent nécessaire d'en faire soi-même l'expérience.
Enfin, mon premier conseil si vous envisagez de vous lancer, sera d'acquérir des jetons de poker. Ils remplaceront très avantageusement les billets fournis.

On présente parfois les jeux de Splotter comme une première étape vers les 18XX. On y retrouve en effet le côté calculatoire, le développement planifié et une forte interaction. Ils ont également en commun leur grande complexité, une prise en main difficile, mais une véritable logique d'ensemble au service du thème.
Sachez d'ailleurs que Splotter a édité un 18XX du nom de "UR: 1830 BC" et qu'il fait parti de ma ludothèque. Nous aurons donc l'occasion de revenir sur cette implémentation originale des mécanismes traditionnels des 18XX à un jeu d'irrigation durant l'antiquité.
Pourquoi ? Comment ?
C'est un mélange de curiosité et de lassitude qui m'a conduit à essayer ces jeux. Cela faisait déjà plusieurs mois que je voyais passer sur les réseaux sociaux des images de jeux de train, en particulier 1846 qui venait d'être édité par GMT. Or j'ai toujours bien aimé les jeux de train, la construction d'une ligne ferroviaire ayant un côté ludique primaire. Le fait qu'un éditeur comme GMT décide de se lancer sur ce marché, n'a fait que renforcer ma curiosité. Il est réputé pour des jeux complexes, surtout des wargames, mais je garde un bon souvenir de Dominant Species, dont la règle était un modèle du genre. 1846 étant présenté comme une porte d'entrée pour euro-gamers, il semblait donc être un parfait candidat pour nous.

Pourtant ce n'est pas avec lui que nous avons commencé... J'avais acheté quelques années plus tôt Poseidon, édité par Lookout. A cette époque l'éditeur venait de sortir Agricola et Le Havre, je lui faisais donc confiance pour nous faire découvrir de bons jeux. Pour des débutants comme nous, Poseidon a l'avantage de sa relative simplicité. Ses règles sont courtes et le jeu reste assez simple à prendre en main. Il permet de se familiariser avec quelques notions de base des 18XX, mais il est aussi limité et un peu fastidieux. Nous avions donc hâte de passer à l'étape suivante, avec des trains cette fois.
C'est vraiment 1846 qui a commencé à nous donner le virus.
La construction de réseau y est primordiale, et ça tombe bien puisque c'est un des aspects qui m'avaient motivé. En permettant de placer 2 tuiles à chaque "Operating Round", les réseaux se développent rapidement et les coup-bas se contournent souvent sans trop de dommages. 1846 est un jeu gentil, assez proche de l'esprit des jeux européens. C'est agréable lorsqu'on se lance, mais au fil des parties on aimerait avoir plus d'impact sur le jeu de nos adversaires. Et lorsqu'on a goûté à 1830 ce n'est rien de le dire...
Et puis il faut reconnaître que nous avions pris de très mauvaises habitudes, héritées de notre passé d'euro-gamers exclusifs. Nous avions tendances à investir dans des sociétés pour les développer coûte que coûte. Nous n'envisagions pas de nous en séparer, cela aurait été avouer notre échec. En parallèle, nous investissions dans les sociétés de nos adversaires dans l'espoir de profiter de leurs dividendes, mais sans imaginer qu'ils pouvaient nous les laisser sur les bras, en ayant pris soin de vider la caisse juste avant.
Il était urgent de revoir en profondeur notre façon de jouer, sans quoi nous allions passer à côté de ces jeux. Et cela n'a pas été facile.
1830, la référence.
Avant 1830 qui fût un peu difficile à trouver, je m'étais lancé dans la fabrication de 1889 qui est souvent recommandé pour débuter.
Je ne ne le pense pas personnellement. Sa règle est assez mal rédigée et s'appuie trop souvent sur le fait qu'on connaît déjà 1830. Ce n'était pas notre cas à cette époque et nos premières parties de 1889 ont donc été assez difficiles. Il nous a toutefois permis d'entrevoir d'autres facettes des 18XX.
Et comme la lecture des règles de 1830 s'avérait manifestement indispensable pour continuer ce périple dans de bonnes conditions, alors autant y jouer...
La lecture de la règle de 1830 m'a permis de mieux comprendre beaucoup de choses.
Pour autant, nous avons encore passé des moments difficiles, suites à quelques erreurs et oublis lors des premières parties. Nous sommes d'ailleurs revenus quelques temps sur 1846, histoire de ne pas nous décourager. Et c'est là que nous nous sommes rendus compte que de nombreux éléments permettant d'influencer le jeu, présents dans 1830, nous manquaient dans 1846.
Nous sommes donc retournés finalement sur 1830, dans un autre état d'esprit, plus attentifs aux conseils glanés sur le net, avec un jeu plus agressif ou les manipulations de cours et abandons de compagnies sont devenus plus fréquents. Dès lors, le jeu s'est imposé pour nous aussi comme la référence dont nous sommes bien loin d'avoir fait le tour. On découvre de nouvelles possiblités presque à chaque partie.
Améliorer notre jeu nous a également permis de réduire la durée de nos parties, même si elles sont encore bien trop longues. On passe notamment trop de temps à compter et recompter les gains de nos compagnies selon les différents trajets possibles.
18CZ, encore une étape.

Les 18XX sont des jeux où l'interaction est forte, qui prennent toute leur saveur lorsqu'il y a suffisamment de joueurs autours de la table. Mais pour des jeux aussi complexes, il n'est pas toujours facile de réunir du monde pour de longues heures. Or 18CZ peut se jouer à 2. Un élément décisif, avec sa disponibilité, qui a motivé mon achat. Je ne l'ai pas encore essayé dans cette configuration, mais seulement à 3 joueurs. Il a encore modifié mon regard sur les 18XX, en me faisant découvrir de nouveaux mécanismes qui changent considérablement le jeu. Et malgré notre expérience avec 1846 et 1830, il a encore fallu nous accrocher pour découvrir 18CZ avec ses multiples compagnies qui peuvent se racheter et surtout ses trains à triples valeurs, dépendant de la taille de compagnie qui les achète. Bref ce n'est clairement pas un jeu pour débuter. Mais les nouvelles possibilités qu'il nous offre sont impressionnantes.
Bilan après 1 an et 25 parties
Je suis ravi de mes nouvelles découvertes. L'investissement personnel est important, mais après quelques parties les mécanismes de base sont assimilés et il ne reste qu'à retenir les spécificités de chaque jeu. C'est assez facile entre 1846, 1830 et 1889, pour lesquels les règles sont très proches. Ca devient un peu plus complexe pour 18CZ qui est tellement particulier. Mais c'est aussi ça qui fait la richesse des 18XX.
Nos fins de parties sont souvent encore un peu laborieuses, mais il est assez exaltant de partir de rien, de construire un réseau et de développer sa compagnie, d'essayer de prendre nos adversaires de vitesse et de se montrer sans pitié si l'occasion de leur faire perdre de l'argent se présente. C'est une logique de jeu assez différente de celle à laquelle nous étions habitués, mais en tant qu'amateur de jeux de stratégie et développement je m'y retrouve. Ces 18XX constituent pour moi un vrai renouvellement ludique dont j'avais besoin et me motive à élargir encore un peu plus mes horizons.



Et ensuite ?
Depuis quelques temps ça bouge dans l'univers des 18XX et l'interêt du public devient de plus en plus marqué. Sans doute est-ce un effet de bord du succès des jeux de société. Les jeux deviennent plus faciles à trouver, de nouveaux éditeurs se lancent, certains repensent leur modèle pour produire plus et mieux diffuser. Nul doute que ce mouvement devrait continuer pour notre plus grand plaisir. Pour ma part, j'ai déjà en réserve ou en commande 1824, 1849, 1862, 18MEX et 1861/67..

Enfin je tenais à remercier ici tous ceux qui m'ont aidé dans cette aventure, grâce à leurs précieux conseils, aussi bien d'achats que de stratégies. Je pense en particulier à bapts (@bfix1) et Alexandre Piquet (@JdS_67100) qui ont été très actifs sur Twitter.
Et justement bapts (@bfix1) nous fait partager son expérience bien plus complète que la mienne sur le sujet dans la seconde partie de cet article.
Quelques liens sur le sujet.
La page 18XX de boardgamegeek
La famille des 18XX, sur boardgamegeek.
Jouer aux 18XX en France.
Un guide pour débutant, en anglais.
Les 18XX en Print & Play.
L'éditeur américain All-Aboard Games.
Les 18XX de GMT Games.
L'éditeur allemand Markflow Games.